Le Monde Amazigh La Voix Des Hommes Libres
C’est à Rabat, le samedi 25/06/16, à 21:00, au siège du Club des Avocats, quartier Océan de Rabat, que le journal « Le Monde Amazighe » a organisé une table ronde pour commémorer le 60 ème anniversaire de l’assassinat du chef de l’Armée de Libération marocaine, Abbas Messaadi, et rendre un vibrant hommage aux détenus politiques amazighs, recemment libérés, Hamid Ouâdouch et Mustapha Oussaya.
Ont pris part à cette manifestation des membre des familles Messaadi et Sanhaji (Leader de l’Armée de Libération marocaine), des chercheurs, des étudiants, des activistes et des associatifs amazighs, des journalistes et des acteurs politiques. L’activité a été animée par Mme. Amina Ibnou Cheikh, Directrice responsable du journal « Le Monde Amazighe ». La logistique a été assurée par M. Raha Rachid et son équipe.
Après l’allocution de bienvenue et les remerciements de Mme. Ibnou-Cheikh, la parole a été donnée au journaliste Said Bajji qui a présenté une plate-forme du sujet et qui a servi de base aux réactions des intervenants que sont: MM. Ismael Sassi, compagnon de lutte d’ Abbas Messaadi, Dr. Zaki Moubarak, chercheur spécialiste de la Résistance marocaine, Khalil Messaadi, fils d’Abbas Messaadi, Les Sanhaji, le neveu et le frère du leader Sanhaji, Dr. Mohamed Chtatou, chercheur et fils du grand résistant Caid Chtatou, Mohamed Lakhouaja, chercheur historien, Maître Mounir Belakhdar, avocat des détenus amazighes et les deux prisonniers Hamid Ouâdouch et Mustapha Oussaya.
Dans son allocution, Mme Ibnou Cheikh a souligné que le journal « Le Monde Amazigh » a organisé cette table ronde pour commémorer un événement national historique capital ignoré par les responsables officiels de l’Etat marocain et le Haut Commissariat pour la Résistance. Elle a ajouté aussi que l’hommage qui sera rendu aux détenus amazighes s’inscrit dans la continuité, dans ce sens que le sacrifice des prisonniers constitue la continuité du combat mené par l’Armée de Libération quant aux droits des amazighs, marginalisés sur leur terre.
La plate-forme présentée par M. Said Bajji a mis en relief le rôle de l’Armée de Libération et ses leaders et son impact sur le devenir du Maroc. Bien que son action soit objet de marginalisation: elle est ignorée délibérément par le pouvoir et est absente dans les manuels d’histoire officiels. M. Bajji a aussi rappelé l’assassinat non encore élucidé d’Abbas Messaadi et demandé aux intervenants de revenir sur le parcours des leaders de la résistance et sur l’assassinat de Messaadi.
Les intervenants ont mis en exergue un certain nombre de faits en relation avec les leaders de l’Armée de Libération et avec le contexte politique national, régional et international qui a caractérisé cette étape de l’histoire du Maroc. Ils ont affirmé que:
– Les deux leaders de l’Armée de Libération ont mené leurs actions de manière concertée (entre 1954 et 1956);
– Leur départ vers le nord est du à leur échec à Casablanca et au fait que le Rif soit un terrain fertile grâce au lèg laissé par Abdelkrim Elkhattabi;
– Les deux résistants ont eu un accueil chaleureux à Nador où ils réussirent à installer leur quartier général (Poste de commandement) et organiser des entrainements au maniement des armes au profit des résistants. Ils ont également le soutien de la Résistance qui bouillonnait au Moyen et au Haut Atlas;
– L’Armée de Libération a bénéficié du soutien de l’Egypte où séjournait Abdelkrim qui suivait ce qui se passait dans son pays;
– L’Armée de Libération a établi des liens avec les leaders du FLN algérien;
– Les leaders de l’Armée de Libération avaient pour projet de libérer tous les territoires marocains, y compris le Sahara marocain et des villes situées aujourd’hui en Algérie (Tindouf, Touat, Bechar…);
– Les négociations d’Aix-Les-Bains ont été une mascarade dans ce sens qu’elles ont été menées par des leaders du « Mouvement national » (Ben Barka, Bouabid…) qui ont accepté les diktats de la France et ont trahi l’Armée de Libération;
– L’assassinat d’Abbas Messaadi est lié à son refus d’adhérer à la thèse des « nationalistes » qui ont participé à la honte d’Aix-Les-Bains; les documents des services de renseignement français et américains vont dans le sens de cette thèse;
– l’indépendance du Maroc a été confisquée par les « nationalistes »;
– La France a mobilisé le Parti de l’Istiqlal contre Messaadi et l’Armée de Libération;
– La vérité relative à Messaadi et Sanhaji reste inconnue et ce qui est écrit jusqu’à présent reste lacunaire voire erroné;
L’intervention de Maitre Mounir Belakhdar relative aux détenus politiques amazighs a dénoncé la procédure pénale marocaine et a démontré, preuves à l’appui, la vacuité des accusations au niveau du fonds et de la forme. Il a affirmé que le procès est par excellence un procès politique ajoutant que les réponses qu’il a reçues de la part de la Cour de Cassation n’ont pas respecté la procédure pénale. Il s’agit pour lui, d’un complot fomenté par la police judiciaire. Le procès est dont injuste, immoral et inique. Il a enfin demandé la réhabilitation des détenus et la révision de leur procès.
Les deux détenus ont pris la parole pour évoquer les conditions de leur arrestations et les supplices subis dans les geôles de l’Etat marocain: tortures, humiliations, insultes…Ils ont souligné que les interrogatoires qu’ils ont subi ont porté, non sur l’accusation, mais sur le mouvement amazighe et que leur accusations et procès ont des sous-bassements politiques: casser et torpiller la mouvance amazighe et dissuader les militants de continuer la lutte.
Un débat riche et fructueux a couronné cette manifestation qui a duré plus de deux heures. A la fin de l’activité, un hommage a été rendu aux détenus et des trophées ont été remis aux familles Messaadi et Sanhaji ainsi qu’aux détenus amazighes.
Par: Moha Moukhlis
