La ville de Casablanca, capitale économique du Maroc, a connu, l’après-midi du 25 novembre 2018/2968, une gigantesque marche de protestation qui a vu la participation de centaines de milliers de citoyens de différents âges et catégories sociales, appartenant, dans leur majorité, à la région du Souss. Ont également participé à la marche des associations et des instances civiles amazighes, en plus des organisations de développement et des droits humains, contre la spoliation des terres dans la région du Souss.
La marche « Akal », qui a démarrée à 14h00 de la place Maréchal, a parcouru l’Avenue Lalla Yakout et la place des Nations Unies pour s’arrêter à la place de la victoire. Les participants ont scandé des slogans forts qui dénoncent la politique d’exclusion, d’expropriation et de marginalisation que connaissent les provinces du Souss, imputant la responsabilité aux différents gouvernements marocains dont celui de Dr. Saad-Eddine El Othmani.
Cette marche populaire organisée par la Coordination « Akal » de défense des droits de la population du Souss, visait à attirer l’attention sur les souffrances de cette population quant aux pâturages violés et à l’introduction des sangliers qui saccagent les fermes des paysans, afin de satisfaire le tourisme de chasse. Outre cette marche rejetait la loi des pâturages n° 113-13 qui vise, selon les organisateurs de la marche, à violer les pâturages des tribus. Les manifestants ont aussi demandé la libération de tous les détenus de la dignité.
Le communiqué final, lu après la marche, a insisté sur la restitution des terres intégrées au domaine forestier et la revalorisation des coutumes tribales en matière de gestion des terres et des litiges. Le communiqué à également fait endosser la responsabilité à « l’Etat central » quant au viol des terres des tribus et de la population autochtone. Il a demandé la dissolution du Haut Commissariat des Eaux et Forêts et de confier la gestion du secteur aux Conseils élus qui respectent la coutume tribale en tant que source pour légiférer.
Ci-après, le texte du communiqué de la marche du 25 novembre 2018 à Casablanca.
Communiqué à l’opinion publique nationale et internationale
Gloire aux martyrs et détenus de la cause de la terre et de l’identité, et pour la libération de notre peuple glorieux
Gloire aux enfants résistants de nos tribus amazighes qui défendent leurs terres et leur patrimoine amazighe authentique ainsi qu’à tous les détenus des manifestations populaires pacifiques dans toutes les régions de la patrie.
Cette manifestation pacifique, organisée par un ensemble d’organisations et de coordinations culturelles, des droits et de développement sous le slogan « Coordination « akal » de défense du droit de la population à la terre et à la richesse », soutenue par le peuple marocain, aujourd’hui, le 25 novembre 2018, dénonce la politique de marginalisation et de paupérisation de plusieurs régions (depuis le départ de la colonisation militaire française et espagnole du Maroc), visées par des gangs de spoliation des terres, ainsi que les gangs qui violent les pâturages, en plus de tous ceux qui veulent la disparition de notre identité et de notre histoire glorieuses. Cette politique qui se base sur différents moyens dont la falsification qui spolie la population autochtone de ses terres, sur la base de Dahirs (décrets) coloniaux qui nous renvoient à l’époque du Maréchal Lyautey et qui exploitent toutes les ressources, en plus de l’introduction de sangliers, des animaux sauvages et de reptiles dans des régions peuplées ainsi que le viol de l’espace de la population dans la région par les lobbys d’exploitation des pâturages qui y introduisent les troupeaux de dromadaires et de caprins, guidés par des personnes en 4/4 et munies de diverse armes et qui s’apparentent à des milices qui saccagent tout et détruisent les biens, les champs et les dépôts d’eaux. Ces mêmes milices volent les fruits de la semence et détruisent le patrimoine environnemental ainsi que les arganiers et les amandiers et menacent la population on usant des termes racistes et insolents. Les conséquences de ces actes sont la mort des martyrs Lahcen Laghdaich à Ait Abdallah et Lahcen Bouhssoun à Massa, en plus de blessés, de viols et de prise d’otages, sous le regard des autorités sécuritaires et centrales qui n’accomplissent pas leurs devoirs d’assurer la protection de la population autochtone, on se contentent du rôle de spectateurs et n’interviennent que pour empêcher toute personne agissant pour protéger ses propres biens et son honneur. Certains ont été même emprisonnés comme le cas d’Abdallah Ouazama dans la région d’Illalen, toujours incarcéré à la prison de Safi suite à sa condamnation à dix ans de prison ferme. En revanche, le berger qui a tué Lahcen Lghdaich est relaxé, – résidant à Tabia et âgé de plus de 70 ans -, après avoir purgé juste sept mois de prison.
S’ajoute à cela, la politique de déportation forcée et la spoliation des terres dont la région fait l’objet et qui vit dans l’isolement totale et une marginalisation programmée à tous les niveaux, particulièrement au niveau de la santé, de l’enseignement, de l’emploi, et des infrastructures nécessaires à une vie dans la dignité. Ceci est le résultat des politiques discriminatoires makhzéniennes (gouvernementales) entre les régions et qui perpétuent le projet colonial fondé sur la différence entre un « Maroc utile » et un « Maroc inutile ». Ce dernier Maroc, de nos jours, le Makhzen (l’autorité centrale) ambitionne de le transformer en pâturages et forêts afin de l’octroyer aux cheikhs pétrodollars de Moyen-Orient de manière douteuse.
Ce qui se passe aujourd’hui comme événements dangereux à l’encontre de la population autochtone et de ses tribus, connues dans notre pays pour leur résistance acharnée contre l’occupant, leurs sacrifice depuis des milliers d’années, pour la libération et la dignité, en plus de leur contribution au développement et à la paix sociale et humaine au niveau national, est, en fait, un projet infernal qui vise la déportation forcée dans le but de détruire les structures socioculturelles authentiques amazighes de ces tribus et leurs substituer une structure importée.
Et face à cette situation floue et de crise et en l’absence d’une véritable volonté des parties concernées qui adopte la politique de l’oreille sourde à l’encontre des revendications de la population autochtone, au lieu d’honorer ces tribus pour leurs sacrifices, le Makhzen a choisi leur déportation dans l’humiliation vers les faubourgs et les bidonvilles des villes et les poussent à la tentative de traverser la mer, en vivant des souffrances à tous les niveaux. Politique dangereuse qui menace, si elle se poursuit, la paix et la stabilité de notre pays ainsi que son environnement régional et mondial. Pour ce, et en cas d’absence de réponses des autorités à ses revendications urgentes – ignorant les faits cités- nous affirmons notre disposition à militer pour la protection de nos biens et familles.
La Coordination « Akal » de défense du droit de la population à la terre et à la richesse, déclare également à l’opinion publique nationale et internationale ce qui suit :
- Sa demande de dissolution du Haut-Commissariat aux eaux et forêts, considérée comme illégitime et non constitutionnelle, et de confier ses prérogatives de gestion du secteur environnemental et forestier à des conseils élus qui prennent en considération la coutume tribale en tant que source de législation.
- L’abolition des dahirs coloniaux qui spolient les terres de la population autochtone ainsi que tout ce qui s’en est suivi comme décrets et lois., et la compensation des victimes ainsi que l’adoption d’une approche participative au niveau législatif avec les tribus de sorte qu’elle s’adapte au structures socioculturelles tribales.
- La garantie pour la population des régions de son droit de bénéficier des ressources de l’exploitation des richesses de ses terres.
- La protection de l’héritage environnemental et de l’arganier qui a fait l’objet de protection de la part de l’organisation de l’UNESCO et de l’organisation mondial de l’environnement.
- Le refus des grillages mis en place des terres tribales en les classifiant comme forêts et parcs protégés au sein de ce qui est appelé « domaine forestier ».
- La revalorisation des coutumes tribales en s’y référant comme mode de gestion des terres et des litiges.
- Demande à l’Etat marocain de ratifier les conventions internationales relatives aux peuples autochtones et répondre aux recommandations des Nations Unies relatives à la spoliation des terres et à la déportation de la population.
- Son rejet de la loi des pâturages 13.113 qui vise à violer la sacralité des terres individuelles et tribales.
- Demande la libération immédiate de tous les détenus de la dignité et de la terre et l’arrêt des poursuites qui les visent sur tout le territoire national.
- Un appel à la communauté internationale et aux organisations internationales des droits humains ainsi qu’à la communauté marocaine à l’étranger pour soutenir le peuple dans sa lutte contre le mépris, la spoliation et la discrimination raciale.
- Affirmons que la cause de l’attachement de notre peuple à sa terre constitue une cause liée à son devenir qui refuse toutes négociations. Et nous faison endosser à l’Etat central toute la responsabilité quant au viol de la sacralité des terres tribales et des populations autochtones.
Pour la Coordination « Akal » de défense du droit de la population la terre et à la richesse. Casablanca, le 25/11/2018.