Fouad Ahidar est belge d’origine rifaine (marocaine), âgé de 41 ans, père de famille, Il est parlementaire bruxellois et membre influent du parti socialiste flamand SP.A. A son actif, de nombreuses propositions qui sont liées de près ou de loin à la communauté d’origine marocaine.
Défenseur de la cause rifaine, il soutient des évènements et festivités en rapport avec l’identité et la culture amazighes.
Fouad Ahidar entame son troisième mandat en tant que député régional bruxellois. Il est le président de la section bruxelloise de son parti, et a été par le passé membre de cabinets ministériels au gouvernement flamand et fédéral. Il a aussi un mandat en tant qu’élu local, dans sa commune de résidence, Jette.
Fouad Ahidar est devenu le mardi 10 juin 2014 le 1er vice-président du parlement de la région de Bruxelles Capitale.
C’est dans ce cadre que nous l’avons rencontré pour nos lecteur, du journal le Monde Amazigh, pour un entretien à cœur ouvert et il nous a ouvert son cœur.
Monsieur Ahidar, Bonjour, Quelles sont vos impressions après votre désignation à la place du vice-président du parlement bruxellois?
Très heureux par cette nomination. Être le fils d’un ouvrier venant du village lointain de Tamassint d’Al Hoceima et devenir le 1er vice-président du parlement bruxellois : c’est le plus beau cadeau que je puisse offrir à mes parents.
Quelles vont être vos tâches, à partir de maintenant?
Mes tâches:
- gérer le bon déroulement des travaux législatifs du parlement.
- Co présider les séances du bureau et du bureau élargi du parlement.
- S’occuper des relations avec les autres parlements.
- Veiller au bon déroulement des commissions et organiser la séance plénière.
- Favoriser les relations internationales en organisant des échanges avec d’autres parlements en Belgique et à l’étranger.
Vu le nombre important que représente nos concitoyens belges amazighs, quelle place pensez-vous accorder à l’identité, à la culture, à la langue et à la religion d’origine de cette communauté?
Je ne sais pas dissocier le fait d’être d’origine rifaine, car je le suis et je le resterai que je sois président du parlement ou un simple ouvrier.
Je suis le vice-président de tous, mais c’est vrai que nous avons un pincement positif au cœur supplémentaire quand il s’agit de la langue, la culture ou l’histoire du monde amazigh dans son ensemble.
L’intégration signifie-t-elle pour vous l’abandon de l’identité d’origine ou inversement une meilleure place à l’identité et à la culture d’origine dans la vie et dans la réalité belge?
L’intégration: on ne peut être intégré et se sentir bien dans sa peau, que si on sait qui on est, d’où on vient et où on va. C’est parce que j’ai su garder cette identité multiple, que j’ai un contact facile avec les autres. Je ne me sens pas menacé. Je suis Musulman, Marocain, Rifain, Flamand, Bruxellois et Belge. Cela sans aucun complexe.
Pensez-vous que la politique menée par les autorités belges, depuis quatre décennies est un échec?
Bien qu’il y ait eu un gros problème au niveau de l’échec scolaire, nous avons des milliers de jeunes gens qui obtiennent des diplômes qui ont des compétences et pourtant on ne leur donne pas leur chance sur le marché de l’emploi. Oui, il y a des échecs, mais il y a aussi des réussites comme je le dis plus haut on peut toujours mieux faire.
Il y a toujours de la discrimination sur la base du nom, des origines et surtout sur la base religieuse, des milliers de femmes sont exclues du marché de l’emploi. C’est scandaleux.
Immigration choisie, limitée, ou immigration zéro. Ce sont des propositions d’un nombre important d’autochtones. Ces slogans sont-ils applicables, et aussi sont-ils souhaitables, pour notre pays?
L’homme ce n’est pas un arbre. Il a deux jambes. Quand il ne trouve pas son bonheur dans un village, dans une ville, un pays ou un continent, l’homme se déplace. On a tous droit au bonheur. L’immigration choisie pourquoi pas, mais cela veut dire vider les cerveaux de nos pays d’origine et abandonner son développement. Il faut bien y réfléchir. L’Europe ne doit pas devenir une forteresse, malgré qu’elle le devient chaque jour un peu plus.
Pensez-vous que la Belgique est à l’abri du terrorisme religieux suite à l’attentat terroriste au Musée juif de Belgique, qui a couté la vie à quatre personnes, commis par un ancien djihadiste en Syrie?
Personne n’est à l’abri du terrorisme. Vous parlez du Musée juif, je condamne fermement cette acte ignoble. Cet attentat lâche vient nous rappeler qu’il ne faut pas cesser de combattre en Belgique et en Europe l’antisémitisme, l’islamophobie et toutes les formes de racismes.
Vous savez très bien que moins de 2% du terrorisme en Europe est lié directement ou indirectement avec l’Islam : quoi qu’il faille encore le prouver. 98 % est causé par d’autres mouvements qui ne font pas la une des journaux. L’islam est pris pour cible depuis des années. Quand on sème la haine on risque de récolter de la haine. C’est valable pour tous.
L’intégrisme religieux fait que de jeunes issus de l’immigration marocaine partent pour le Jihad en Syrie, quelles mesures pourraient être prises afin d’enrayer ce problème?
Oui, j’ai parlé à une dizaine de jeunes en décrochage scolaires. Ils me disaient qu’ils allaient partir en Syrie. J’étais abasourdi. Ils en avaient marre d’entendre leurs parents, leurs amis, leurs professeurs leur dire que c’étaient des ânes des moins que rien, qu’ils ne savaient ramener que des problèmes, qu’ils faisaient la honte de leur famille. Sur base de ce genre de remarques répétésdepuis des années, ils allaient prouver à leurs parents qu’ils ne sont pas des moins que rien et qu’ils allaient être fièrs d’eux. Pour cela, ils partiraient en Syrie pour prouver que ce sont des hommes prêts à mourir pour l’islam. Je trouve ces départs irresponsables pour ces jeunes qui sont encore en pleine croissance.
Un dernier mot pour nos lecteurs de journal Amazigh au Maroc?
Je souhaite un très bon ramadan à tous les lecteurs du magazine, et leur dire que ma porte sera toujours ouverte, grande ouverte en tant que Fouad Ahidar, mais aussi en tant que vice-président du parlement bruxellois.
Interview réalisé par: Mohamed EL-HAMOUTI