Le Hirak algérien rejette l’imposture de l’armée

Par: Dr Mohamed Chtatou

L’annonce de la candidature d’Abdelaziz Bouteflika était la goutte qui avait fait déborder le vase en Algérie. Le peuple algérien, las d’un régime politique momifié, est sorti comme un seul homme, dans la rue, crier à haute voix et en unisson son dégoût et rejet : enoughisenough.

Toutefois, on se demande pourquoi est-ce que les citoyens algériens sont sortis manifester contre cette candidature pour le 5ème mandat et non pas pour le 4ème avant, sachant pertinemment que Bouteflika était déjà amoindri par l’AVC dès 2013 et ne pouvait en aucun cas gouverner ? La réponse est que, dans le temps, les caisses de l’état étaient encore pleines de pétrodollars et les subsides toujours en usage. Aujourd’hui, l’état algérien, presque sans le sou et usant de la planche à billets à outrance pour palier à son insolvabilité, ne peut se permettre d’acheter la paix sociale et du coup le peuple remet en question tout le système, pour dire si on peut avoir le pain au diable le pouvoir gérontocratique.

La contestation contre le pouvoir gérontocratique

Pour rappel, le peuple algérien n’a pas manifesté durant le Printemps démocratique des peuples pour deux raisons principales : la première étant qu’il a été affaibli et écœuré par la décennie noire : 1990-2000 et la deuxième, le système politique, en plein régime, avait promis monts et merveilles au people une fois la  concorde achevée, mais rien de cela ne fait fut et le people bien que rassasié par le pain offert gracieusement par l’état providence voyait d’un mauvais œil sa jeunesse désœuvrée incapable de réaliser ses objectifs : trouver un travail et fonder une famille.

Tout le monde sait que Bouteflika n’était qu’une interface pour ne pas dire une marionnette du régime militaire qui gouverne l’Algérie avec une poignée de fer. Ce régime sournois et violent trouve ces racines dans l’Armée de Libération qui mena la guerre de libération contre le colonialisme français. Après l’indépendance en 1962, l’armée s’est retirée de la scène politique pour s’aguerrir et se raffermir et laissa ainsi à Ben Bella la possibilité de former un gouvernement civil. Celui-ci auréolé par cette confiance et choix historique oublia vite qui est le vrai maître à bord en Algérie et mis à dos, par ses décisions désinvoltes, Boumedienne, un poids lourd de l’armée, et son poulain le jeune apparatchik Bouteflika.

En 1965, Boumedienne s’accapara du pouvoir et fait revenir l’armée au-devant de la scène politique, une armée dont le leitmotiv politique était et est toujours : ‘‘usage de la violence révolutionnaire, s’il le faut, pour rester au pouvoir’’. L’armée en Algérie, à la différence des autres pays de la région est une nébuleuse, un club secret chapeauté par une quarantaine de haut galonnés qui font la pluie et le beau temps. Déjà en 1991, l’armée avait écarté les Islamistes du Front du Salut Islamique -FIS-, victorieux aux élections législatives du premier tour, poussant le pays dans le gouffre d’une guerre civile de 1990 à 2000 faisant 200 000 victimes. En 1999 elle fut appel au sorcier Bouteflika pour exorciser le mal islamiste par la paix et la concorde. Le secret de la longévité de l’armée au pouvoir est sans aucun doute la possibilité de s’incliner, comme le réseau, pour survivre à la tempête.

Refus populaire algérien du régime en place

Aujourd’hui, encore une fois, elle s’incline devant la volonté inébranlable du peuple algérien qui montra, sans équivoque, son nif (courage) en investissant, en masse, les rues. L’armée a accepté de retirer la candidature de Bouteflika, mais c’est là où le bât blesse et la supercherie politique commence :

  1. Les élections sont reportées sin die, le temps de trouver un remplaçant et de la former pour gouverner pour l’armée;
  2. Bouteflika va continuer à gouverner dans l’illégalité constitutionnelle totale, entre-temps ;
  3. Le débat national est confié à un homme crédible, Lakhdar Ibrahimi qui a un passé diplomatique riche et une carrure internationale, mais va-t-on lui permettre de mettre à jour les vraies doléances du peuple algérien meurtri par la dictature ; et
  4. Si le peuple demande à l’armée de partir, va-t-elle, s’exécuter ou fera-t-elle usage, encore une fois, d’un de ses subterfuges pour se cramponner au pouvoir ?

En tout état de cause, le peuple algérien n’est pas dupe. Il a découvert la supercherie et il va continuer à donner de la voix dans la rue devant les caméras du monde…

Va-t-il gagner ce bras de fer, seul le temps le montrera ?

La contestation ne faiblit point…

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