J’ai lu dans le journal « El Faro de Melilla » de 6 octobre dernier cette information suivante, que l’agence EFE avait déjà annoncée il y a un mois : des découvertes archéologiques dans la cathédrale de la ville de Málaga [1] ont mis au jour des objets (pièces de céramique comme des pots, des bols, des vases ou des assiettes, et des pièces de monnaie) datant de 5 000 ans, qui attestent et enracinent son origine à plus de mille ans de plus que ce que l’on pensait auparavant, prouvant ainsi que l’origine de la ville de Málaga remonte à une époque bien antérieure à l’arrivée des Phéniciens.
Dans les manuels scolaires, tant en Espagne qu’au Maroc, on enseigne que les premières villes fondées sur leurs territoires respectifs sont généralement l’œuvre des Phéniciens, comme si les Maures (d’où vient le terme « Moros », c’est-à-dire les Amazighs d’Afrique du Nord) et les Ibères n’avaient pas la capacité ingénieuse de fonder des noyaux urbains. Ainsi, les villes côtières les plus anciennes des deux rives de la Méditerranée occidentale, comme la ville de Rusadir (Melilla) ou les villes de Tamuda (Tétouan), Tingis (Tanger), Lixus (Larache), Sala (Rabat), Malaca (Málaga) et Gadès (Cadix), étaient attribuées aux Phéniciens, alors que nous savons que ces derniers se contentaient de prospérer leurs commerces grâce à leurs échanges maritimes avec les villes qu’ils trouvaient le long des côtes méditerranéennes. Une des preuves avancées par certains archéologues marocains est l’absence de sépultures phéniciennes dans ces centres urbanisés. J’avais évoqué ce fait archéologique il y a environ deux ans lors d’une interview avec la Télévision de Melilla [2].
Le 9 mai 2017, l’Institut Cervantes de Rabat a organisé un colloque sur le thème « Quelle relation entre les Amazighs et les Ibères ? » avec la participation du grand immunologue et anthropologue généticien Dr. Antonio Arnaïz Villena et moi-même, et nous sommes parvenus à la conclusion qu’avant l’arrivée du christianisme dans la péninsule ibérique et de l’islam en Afrique du Nord, les peuples des deux rives de la Méditerranée occidentale formaient un seul et même peuple [3]. Un même peuple dont les communautés échangeaient leurs populations à des époques reculées de la préhistoire et durant la période néolithique avec l’essor de l’agriculture, comme l’a récemment révélé la découverte d’un grand complexe agricole sur le site d’Assif Beht (Oued Beht) [4,5]. Et de l’agriculture, ils sont passés à l’urbanisation !
En conclusion, Rusadir tout comme Malaga ont été fondées par nos anciennes populations autochtones, respectivement les Amazighs et les Ibères, dont nous devons exalter l’histoire commune et partagée et encourager davantage de découvertes archéologiques hispano-marocaines.
Par Rachid RAHA, Président de la Fondation « David Montgomery Hart » des Études Amazighes
Notes:
[2]- https://www.youtube.com/watch?v=1ep9zZ3Rr28