Tiwizi, une solidarité collective ou une valeur primordiale!

Par: Aïssa Jabbour (Étudiant-chercheur)

La solidarité collective est une valeur importante qui se pratique au sein des sociétés depuis la nuit des temps. Elle peut s’expliquer par un sentiment d’appartenance partagé par les membres du groupe dans le but de renforcer leur lien social.

Ce devoir réciproque trouve sa place dans la société marocaine sous diverses formes. Par conséquent, dans la communauté berbère, nous avons une sorte de solidarité, connue sous l’appellation de Tiwizi ou Tiwiza. C’est l’une des valeurs fondamentales. Il s’agit en effet d’une pratique des travaux collectifs non rémunérés destinés essentiellement à une seule personne, et parfois, à une famille ou bien à un groupe des villageois.

Le terme Tiwizi / Tiwiza provient du mot Tiwisi, mais il se prononce habituellement Tiwizi, son verbe Aws qui veut dire ; Aider. Cette entraide ancestrale repose sur la participation de tous les membres de la tribu à la réalisation d’un travail qui demande la participation de plusieurs personnes.

Véritablement, ce mode de travail collectif se pratiquait autrefois tout au long de l’année selon les rites et les saisons. On peut prendre comme exemple :

Tizeghi n tghremt (construction de Kasbah) ; les gens s’aidaient entre eux dans un travail collectif à fin de bâtir une maison en terre et en pierre à une famille du groupe. Cette maison contenait plusieurs foyers qui appartenaient souvent à un même clan.

Tagrza (l’agriculture) ; les villageois travaillaient au nom de Tiwizi dans la cueillette des fruits, le gaulage des olives et des noix, les labours des petits lopins, les moissons, la récolte des céréales, le ramassage des herbes, le nettoyage de l’orge et le vannage du blé, sans oublier, que l’emploi des outils et des matériels d’agriculture est également collectif. Selon la tradition, il y avait un homme dans chaque village des Aït Merghad (tribu au sud-est du Maroc) qui veillait à la garde des grains (Amud) pour les moments de sécheresse pour ne pas tomber dans le manque, il s’appelait jadis bu wamud.

En ce qui concerne les fêtes, il y avait une dizaine qui se partageait entre les villageois avec des chants et des you-yous des femmes relatives à cette commémoration en préparant des repas copieux. Toutes ces festivités se caractérisaient par la solidarité entre les gens notamment au moment de l’organisation des galas collectifs après la moisson. En outre, la célébration des fêtes à caractère sacré qui se préparaient rarement à titre d’exemple Ttelghenja, cela se faisait uniquement durant les périodes de sécheresse à fin de quémander à Dieu la pluie. À travers cette fête, les villageois organisaient un gros festin au cœur du village (Imi n ighrem) en chantant des chants splendides et célestes en présence des membres de la communauté sans exception. Ensuite,  tafugla n UHawel n Ayt Rebb ( la fête de réconciliation avec les dieux) selon laquelle les villageois préparaient annuellement un mets collectif dans un endroit sacré juste auprès du village dans le but de revivre la promesse avec les dieux.

Tiwizi jouait un rôle crucial dans la transhumance : autrefois quelques semaines avant l’entrée d’été ; les nomades s’apprêtaient en groupe à quitter liqqbelt (endroit désertique) pour aller à Adrar (montagne). Durant ces moments, les tentes (foyers) se réunissaient sous le nom Tiwizi pour faire la tonte (Talusi) d’une manière générale à leur bétail. En ajoutant que ; les groupes sédentaires organisaient pendant les années sèches ce qu’on appelle AHtal (une sorte de voyage collective avec des mulets à destination d’une région fertile pour apporter les céréales, les dattes et tous les approvisionnements nécessaires aux villageois). Selon la tradition d’AHtal, c’étaient les villageois qui choisissaient le groupe qu’ils voulaient envoyer, ce groupe s’appelait à l’époque ImeHtallen.

 Twizi tenait également une place considérable pendant les mariages surtout avec les femmes qui se réunissaient autour d’un unique travail ; à titre d’exemple(le pilonnage de l’orge et de sel, la préparation du trousseau de la mariée/mari,…). Certes, cette entraide se répétait dans chaque occasion.

 On ne pouvait pas nier la présence d’un système bancaire notamment dans l’Anti-Atlas, c’était le système d’Igoudar (grenier collectif) où chaque famille possédait une chambre où elle entreposait orge, huile, bijoux, vêtements de cérémonie, reliques, actes de toutes sorte, et dont la clef ne quittait jamais l’aïeule la plus âgée du clan et personne n’avait pas le droit de toucher les réserves et affaires des autres.

En bref, la communauté berbère se caractérise par sa générosité et son ouverture sur d’autres cultures, d’autres civilisations et sa tolérance avec tout le monde.  Elle se composait d’un système tribal bien organisé.

Mais, avec l’avènement du colonisateur ; cette solidarité collective ‘Tiwizi’ a pris une autre dimension vers une abîme où elle s’effritait. Aujourd’hui, personne ne parle plus de ce travail bénévole et volontaire qui s’inscrit dans notre Histoire millénaire.

Lire Aussi...

Barid Al-Maghrib consolide son rôle de leader de la confiance numérique au Maroc

Barid Al-Maghrib confirme sa position de leader en tant que prestataire de la confiance numérique ...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *