Journée nationale de migrant: Discrimination persistante à l’encontre des Amazighs de la communauté marocaine résidente à l’étranger

A l’occasion de la Journée nationale de migrant, le président du l’Assemblée Mondial Amazighe, Rachid Raha, a adressé à un groupe d’institutions concernées par les immigrés, sur « la poursuite des discriminations persistante à l’encontre des Amazighs de la communauté marocaine résidente à l’étranger« .

Voici le texte intégral :

Rabat, le 10 août 2023/2973

A Messieurs :

  • Nasser BOURITA, Ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération et des Marocains résidant à l’étranger (MRE) du Royaume du Maroc,
  • Chakib BENMOUSSA, Ministre de l’Education Nationale
  • Omar AZZIMAN, Président délégué de la Fondation Hassan II pour les MRE
  • Abderrahman ZAHI, Secrétaire Général de la Fondation Hassan II pour les MRE
  • Driss EL YAZAMI, Président du Conseil de la Communauté Marocaine à l’Etranger (CCME)
  • Abdellah BOUSSOUF, Secrétaire général du CCME

Objet: Discrimination persistante à l’encontre des Amazighs de la communauté marocaine résidente à l’étranger

Messieurs, azul,

A l’occasion de la journée nationale de migrant, nous avons le plaisir de vous adresser cette correspondance sur le thème de la persistance de la discrimination des Amazighs de la communauté marocaine résidente à l’étranger de la part de vos institutions.

Dans un discours adressé à la nation à l’occasion du 69ème anniversaire de la révolution du roi et du peuple, Sa Majesté le Roi a appelé à « moderniser et réhabiliter le cadre institutionnel de la communauté marocaine à l’étranger, et reconsidérer le modèle de gouvernance des institutions, en vue d’accroître leur efficacité et leur intégration ». Dans son allocution, Sa Majesté a ajouté : « Nous devons constamment nous demander : que leur avons-nous prévu pour consolider ce lien avec la patrie ? Le cadre législatif et les politiques publiques tiennent-ils compte de leur vie privée ? Les mesures administratives sont-elles à la mesure de leur situation ? Leur avons-nous fourni l’encadrement religieux et éducatif nécessaire ? ». Les politiques publiques «sont dans l’intérêt de cette communauté et lui consacrent un soutien fort par la création d’un dispositif spécial, dont la mission est d’accompagner les compétences et les talents marocains à l’étranger, et de soutenir leurs initiatives et projets. »

Un an après ce Discours Royal, et compte tenu des correspondances de notre organisation Assemblée Mondiale Amazighe, quelles raisons poussent ces différentes institutions à continuer à l’exclusion de l’enseignement de la langue amazighe aux enfants des citoyens marocains résidants à l’étranger ? Et pourtant et à chaque occasion, ces institutions, et d’autres, mentionnent que l’amazigh est un bien commun pour tous les Marocains, sans exception. Ainsi que cette négligence continuelle de la Constitution, de la loi et des discours royaux que Sa Majesté a porté sur l’amazighité depuis le discours historique d’Ajdir jusqu’à la reconnaissance du nouvel an amazigh comme fête officielle pour tous les Marocains. Aujourd’hui, on est en droit de s’interroger sur le sort des discours royaux et où est passée « la modernisation et la réhabilitation du cadre institutionnel de la communauté marocaine à l’étranger ? », et de se demander « si le modèle de gouvernance des institutions existantes a-t-il été effectivement revu, dans le but d’accroître leur efficacité et leur intégration ? ».

Permettez-nous de vous confesser que, malheureusement, il n’y a pas eu de changement tangible au sein des différentes autorités concernées, et qu’elles n’ont pas interagi avec la volonté royale exprimée dans le texte de ce discours. Et nous, en tant que société civile, suivant ce dossier lié à la communauté marocaine résidente à l’étranger de très près, nous n’avons ressenti aucune volonté de la part d’aucune de vos institutions de traiter avec la langue amazighe, la langue officielle de l’État et le bien commun de tous les Marocains. Au contraire, vos institutions ont fait preuve d’un cuisant échec à mettre en œuvre ce que Sa Majesté avait désiré, et par conséquent, votre incapacité à s’acquitter de vos fonctions comme il se doit, et nous mentionnons en particulier la discrimination persistante et incompréhensible à l’encontre de l’identité amazighe de la communauté marocaine à l’étranger.

Nous avons envoyé, à plusieurs reprises, des courriers au Ministre de l’Education Nationale (1) et à diverses institutions similaires concernant l’enseignement du tamazight aux enfants des Marocains à l’étranger. Nous avons attiré plus d’une fois l’attention du ministre de l’Éducation nationale sur le fait que le mépris total du ministère pour l’enseignement de l’amazigh aux enfants de la communauté marocaine à l’étranger est une démarche délibérée qui reflète une discrimination raciale, qui va tout à fait à encontre de l’esprit de la Constitution de 1er  juillet 2011, au contenu de l’article 5 de celle-ci, et aux objectifs de la loi organique n° 16-26 relatif à la mise en œuvre des étapes d’activation de l’officialité de l’amazigh et des modalités de son intégration dans le domaine de l’éducation et dans les domaines prioritaires de la vie publique (2). Sans oublier que cela se fait en violation flagrante des articles 7 et 8 de la Convention internationale des droits de l’enfant et des recommandations émises par l’UNESCO et par la Banque mondiale concernant l’importance de la langue maternelle dans l’éducation des enfants.

Nous vous rappelons que la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, Mme E. Tendayi ACHIUME (3), qui s’est rendue au Royaume du Maroc en décembre 2018, avait souligné que la discrimination persiste à l’encontre des Amazighs en raison de leur langue et de leur culture. En conséquence, elle avait, elle aussi, renouvelé cette insistante recommandation appelant le Royaume du Maroc à « intensifier les efforts pour faire en sorte que les Amazighs ne soient pas victimes de discrimination raciale dans l’exercice de leurs droits fondamentaux, notamment en ce qui concerne l’éducation…« .

Nous sommes très surpris par l’exclusion totale de la culture et de la langue amazighe, et nous considérons que la poursuite de la ratification des lois, décisions et projets intéressant le domaine des langues et de la culture marocaines aux émigrés avec l’exclusion totale de la langue amazighe représente clairement une discrimination et un racisme contre la langue et la culture de millions de Marocains, à l’intérieur et à l’extérieur du Maroc, tout en soulignant que l’écrasante majorité de la communauté marocaine résidente dans divers pays européens et dans le monde est d’origine amazighe et amazighophone.

Nous réaffirmons la nécessité d’enseigner la langue amazighe aux enfants des Citoyens Marocains Résidents à l’Etranger, et de travailler à partir de vos institutions pour établir une pleine égalité entre la langue arabe et la langue amazighe, à l’intérieur et à l’extérieur du Maroc, et ce afin de respecter la constitution marocaine, qui stipule dans son préambule que : « …le Royaume du Maroc réaffirme ce qui suit et s’y engage à bannir et combattre toute discrimination à l’encontre de quiconque, en raison du sexe, de la couleur, des croyances, de la culture, de l’origine, sociale ou régionale, de la langue, de l’handicap ou de quelque circonstance personnelle que ce soit ».

Nous vous rappelons également que Sa Majesté le Roi Mohamed VI a affirmé à l’occasion de la décision de reconnaissance de nouvel an amazigh que: « l’Amazighe en tant que composante essentielle de l’identité marocaine authentique riche par la pluralité de ses affluents et patrimoine commun à tous les Marocains sans exception ».

En conclusion, Sa Majesté le Roi, dans son dernier discours à la nation à l’occasion du vingt-quatrième anniversaire de son accession au trône, a mis en évidence l’importance du sérieux, de la sincérité et du dévouement au travail afin de permettre au Royaume de réaliser de nombreuses réalisations et surmonter ses difficultés. Il a affirmé que : « Le sérieux que Nous exaltons n’est pas un terme vide de sens, de portée purement formelle. C’est, au contraire, un concept intégré qui recouvre un ensemble d’idéaux et de principes opératoires. Aussi longtemps que le sérieux est le moteur de nos actions, nous réussirons à renverser les difficultés et à relever les défis…Le sérieux doit constamment définir notre ligne de conduite, dans la vie de tous les jours comme au travail. Par conséquent, il doit être de rigueur dans tous les secteurs d’activité : … dans le domaine politique, administratif et judiciaire, il importe que prévale le dévouement au service du citoyen, par l’identification de profils qualifiés, par la primauté accordée aux intérêts supérieurs de la Nation et des citoyens, loin des surenchères et des calculs étroits. ».

En définitive et par conséquent, nous vous appelons vivement, en tant que hauts responsables de vos institutions, à être « sérieux » dans le traitement de cet important dossier lié à l’enseignement de la langue et de la culture amazighes aux enfants des Citoyens Marocains Résidents à l’Etranger, ceci en accord avec le respect de la Constitution, de la loi organique et de la Volonté Royale. Sinon, reconnaissez et admettez votre incapacité à gérer ce dossier à cause de vos considérations idéologiques et présentez vos démissions pour laisser la place à d’autres personnalités plus ouvertes et plus respectueuses de la Constitution et des lois marocaines, des personnalités imprégnées des valeurs de pluralisme, de diversité et de démocratie.

Veuillez agréer, Messieurs, l’expression de nos salutations distinguées.

Signé : Rachid RAHA, Président de l’Assemblée Mondiale Amazighe

Notes :

(1) https://www.gitpa.org/PDF/220616%20MAROC%20Des%20ONG%20Amazighs%20interpellent%20le%20ministre%20marocain%20de%20l’education%20.pdf
(2) http://www.sgg.gov.ma/Portals/1/lois/Loi_26.16_Ar.pdf?ver=2019-10-31-150558-640
(3) https://amadalamazigh.press.ma/fr/lonu-demande-au-maroc-dintensifier-les-efforts-pour-que-les-amazighs-ne-soient-pas-victimes-de-discrimination-raciale/

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Un Commentaire

  1. ⴰⵣⵓⵍ ⵎⴰⵙ ⵕⴰⵛⵉⴷ
    ⴰⴼⵓⴸ ⵉⴳⴻⵔⵣⴻⵏ ⵝⵓⴸⴻⵔⵝ ⵉⴼⴰⵣⴻⵏ ⵉ ⵝⵎⴰⵣⵉⵖⵝ ⴸ ⵡⴰⵔⴰⵡ ⵉⵙ. ⴰⴼⵓⵙ ⴸⴻⴳ ⵡⴼⵓⵙ. ⵉⵢⵢⵓⵣⴻⵏ !

    ⵙ ⴳⵓⵍ
    ⵎⵓⵃⴻⵏⴷ ⵓⵕⴻⵎⴹⴰⵏ ⴿⴰⵙⴻⵔ
    ⴰⵙⴻⵍⵡⴰⵢ ⵏ ⵓⴼⵓⵙ ⴸⴻⴳ ⵡⴼⵓⵙ

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