L’Association Amghar pour la Culture et le Développement à Khénifra, en coordination avec l’Association Thifsâ Atlas pour le Développement Durable (Mrirt) et la Coordination des Enseignants de Langue Amazighe (Khénifra), a organisé une conférence scientifique sur le thème « La réalité de l’enseignement de la langue amazighe dans le système éducatif face aux défis actuels », au Centre de formation et de qualification des femmes, le samedi 2 novembre 2024.
Cette conférence a été animée par trois intervenants: M. Ismaïl Ezgaghi, enseignant spécialisé dans l’enseignement de la langue amazighe au niveau primaire et membre du bureau national de la Coordination des Enseignants de Langue Amazighe; Mme Hassana Boulahfa, chercheuse spécialisée dans la langue amazighe, qui forme au Centre Régional des Métiers de l’Éducation et de la Formation à Rabat ; et M. Mustapha Oumouch, inspecteur pédagogique et chercheur en didactique de la langue amazighe. Les interventions ont abordé le thème de l’enseignement de la langue amazighe sous différents angles. La conférence a été modérée par le professeur chercheur Abdellah El Hajoui, tandis que Mme Nadia Elflouhi a contribué aux travaux en tant que rapporteuse.
Cette rencontre s’inscrit dans le cadre des efforts des associations amazighes pour promouvoir l’enseignement de la langue amazighe, surtout en raison des défis actuels d’intégration de cette langue, reconnue officielle dans la Constitution de 2011, mais encore peu présente dans le système éducatif.
Les travaux de la conférence, marqués par la présence de chercheurs et de militants engagés pour la cause amazighe en général et pour l’enseignement de la langue amazighe en particulier, ont débuté par un mot de bienvenue prononcé par M. Abdellah El Hajoui, modérateur de l’événement. Ensuite, M. El Hajj Allal, président de l’Association Amghar, a pris la parole pour expliquer le contexte général de cet événement culturel et scientifique, soulignant l’importance de la coordination entre l’Association Amghar, l’Association Thifsâ et la Coordination des Enseignants de Langue Amazighe, vu les intérêts communs. Il a également appelé au renforcement de la coopération entre les associations actives dans le domaine amazigh, en raison de son importance pour la plaidoirie civile, et pour inciter les acteurs officiels à accorder à la langue amazighe la place qu’elle mérite, notamment dans l’enseignement.
Les interventions des professeurs participants à la conférence ont été marquées par leur rigueur et leur profondeur scientifique, reflétant l’expérience accumulée dans le domaine de l’enseignement de la langue amazighe. M. Ismaïl Ezgaghi a présenté une analyse approfondie de la réalité de l’enseignement de l’amazighe au niveau primaire. Il a expliqué que, bien que l’intégration de cette langue dans l’éducation remonte à 2003, la situation actuelle montre un manque de sérieux et de volonté suffisante de la part des politiques officielles pour assurer une véritable intégration de la langue amazighe dans le système éducatif. Il a donné plusieurs exemples concrets illustrant la marginalisation dont souffre cette langue, tels que le manque important de professeurs, l’absence de matériel pédagogique, et le temps limité dédié à l’enseignement de la langue amazighe.
De son côté, Mme Hassana Boulahfa a exposé les contraintes liées à la formation des enseignants spécialisés dans la langue amazighe. Forte de son expérience en tant que formatrice au Centre Régional des Métiers de l’Éducation et de la Formation à Rabat, elle a expliqué que le ministère adopte une politique improvisée dans le domaine de la formation, tant en termes de nombre limité de formateurs dans les centres qu’en termes de postes budgétaires insuffisants pour recruter des enseignants spécialisés. Elle a souligné que la formation des enseignants constitue une pierre angulaire pour renforcer l’intégration de la langue amazighe dans le secteur éducatif.
La troisième intervention, menée par M. Mustapha Oumouch, inspecteur pédagogique et chercheur en didactique de la langue amazighe, a proposé une analyse approfondie du processus d’intégration de l’amazighe dans le système éducatif. En s’appuyant sur des données statistiques précises concernant le nombre d’enseignants formés entre 2003 et 2024, il a relevé que la couverture des établissements d’enseignement primaire reste inférieure à 20 %. Il a ainsi mis en doute l’engagement de l’État envers une généralisation effective de l’amazighe dans l’éducation. M. Oumouch a également présenté des cas de réussite dans certaines écoles, où des élèves parviennent à maîtriser l’amazighe malgré un environnement familial arabophone. Il a conclu en affirmant que l’intérêt pour la langue amazighe devrait naître au sein de la famille, pilier de la socialisation.