Profanation du drapeau amazigh à Tripoli
Tamazgha dénonce les autorités libyennes et apporte un soutien sans réserve aux Amazighs de Libye
Des individus, parmi lesquels des éléments appartenant au ministère de l’Intérieur, ont organisé mercredi 19 février dans le quartier Qerqarsh à Tripoli une profanation du drapeau amazigh : ils ont mis le drapeau sur la chaussée empruntée par les voitures obligeant les automobilistes à rouler dessus tout en scandant des propos hostiles aux Amazighs. Un autre groupe a brûlé un drapeau. Les individus responsables de cet acte odieux seraient tous originaires de la ville de Zentan d’où est issu Imad Trabelsi faisant fonction de ministre de l’Intérieur du Gouvernement d’Entente Nationale en Libye. Cet ancien gangster qui ne cache pas son hostilité et sa haine envers les Amazighs a multiplié les provocations visant les Amazighs depuis qu’il a été porté à ce poste de responsabilité en 2022.
Dès le lendemain, le 20 février, les différents acteurs amazighs, notamment les municipalités, ont réagi pour dénoncer cet ignoble acte et demander des explications aux autorités libyennes qu’ils ont sommées de réagir pour arrêter les coupables et les différer devant les tribunaux. Aussi, des manifestations publiques avec des déclarations d’organisations représentatives des Amazighs se sont déroulées un peu partout à travers Adrar n Infusen et At-Willul. Des déclarations de solidarité d’autres régions ont également été rendues publiques.
Si un communiqué attribué au Gouvernement d’Entente Nationale a été diffusé sur les réseaux sociaux le 21 février, deux jours après l’atteinte publique à l’un des symboles des Amazighs, tout laisse à supposer qu’il est fait dans le but de berner les Amazighs et leur faire croire qu’ils sont entendus, alors qu’aucune action concrète n’ait été prise. Aussi, aucune prise de parole publique de nature à rassurer les Amazighs n’a eu lieu. Imad Trabelsi faisant fonction de ministre de l’Intérieur, a observé le silence et n’a présenté aucune explication au sujet de l’implication d’éléments de son ministère dans la profanation du 19 février.
Une grande manifestation pacifique a eu lieu à la Place des Martyrs à Tripoli le mercredi 26 février pour dénoncer la profanation du drapeau amazigh, la multiplication des provocations visant les Amazighs notamment de la part de Trabelsi Imad, faisant fonction de ministre de l’Intérieur, qui alimente la haine et l’hostilité envers les Amazighs. Dans leur déclaration, lue par le président du Haut conseil des Amazighs de Libye (HCAL), les représentants des régions amazighes venus manifester à Tripoli ont tenu à réaffirmer leur condamnation de l’incident de profanation du drapeau amazigh ainsi que le silence des institutions étatiques. Ils exigent l’arrestation des coupables et demandent la démission du faisant fonction de ministre de l’Intérieur ainsi que du chef de la sécurité publique. Le lendemain, le jeudi 27 février, une délégation amazighe a été reçue par Hanna Serwaa Tetteh, représentante spéciale et Cheffe de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), auprès de qui ont été exposées diverses questions. Les représentants des Amazighs ont sollicité son soutien face aux attaques officielles et à la marginalisation qui les visent. La représentante des Nations unies en Libye a prié d’user de ses pouvoirs afin d’interpeler les autorités libyennes pour prendre en considération les Amazighs et leurs droits dans le but de préserver la paix civile et la stabilité politique.
Tamazgha, organisation non gouvernementale de défense des droits et intérêts des Amazighs, condamne avec force les actes de profanation ayant visé les symboles de l’identité amazighe à Tripoli le 19 février 2025 sous le regard complice d’éléments relevant des institutions de l’État libyen. Cette atteinte ne vise pas seulement les Amazighs de Libye, mais l’ensemble des Amazighs. Et nous tenons les autorités libyennes pour responsables de ces actes de haine et de racisme condamnés par des conventions internationales de droits de l’Homme que l’État libyen a pourtant signées et ratifiées.
Tamazgha tient à exprimer sa totale solidarité avec les Amazighs de Libye et leurs organisations représentatives dans l’ensemble de leurs démarches en vue de défendre leurs symboles, leurs intérêts et leurs droits fondamentaux.
Ayant suivi l’évolution de la situation en Libye depuis 2011, nous avons constaté que l’arrivée de Imad Trabelsi au ministère de l’Intérieur a été chaperonnée d’un plan systématique d’attaques et de provocations visant les régions d’Adrar n Infusen et d’At-Willul. Ses agissements semblent cacher une hostilité et une haine aux relents racistes envers les Amazighs. Imad Trabelsi parait ainsi comme le pur produit du kadhafisme animé par une idéologie de haine et de violence qu’il parait vouloir reproduire. Cette attitude est, bien entendu, insupportable pour les Amazighs qui aspirent à un avenir débarrassé de l’injustice qu’ils ont subie jusqu’à 2011. Et s’ils ont pris les armes pour se débarrasser de Kadhafi et de son régime et ont participé à la libération de la Libye du monstre au prix de la vie de plusieurs martyrs, ce n’est pas pour que des produits du kadhafisme leur imposent leurs dictats aujourd’hui et les replongent dans le passé. Les Amazighs n’ont pas donné leurs sacrifices de 2011 et n’ont pas défendu, en 2019-2020, la capitale Tripoli contre l’attaque des Forces armées arabes libyennes (FAAL) de Khalifa Haftar qui veut instaurer un régime militaire, pour être aujourd’hui soumis à l’humiliation d’un ancien trafiquant, cité en 2018 par un groupe d’experts des Nations unies comme étant responsable de milices impliquées dans la contrebande de carburant à dans l’Ouest de la Libye, et qui squatte le ministère de l’Intérieur libyen où il a été nommé pour « services rendus ». Les autorités libyennes sont tenues de remplir leurs obligations énoncées dans les conventions et pactes internationaux, notamment la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, par ailleurs signée et ratifiée par l’État libyen.
Les Amazighs de Libye ne sont pas prêts à renoncer à la Liberté arrachée au prix du sang de leur jeunesse. Nous tenons à saluer leur abnégation et leur vigilance face aux menaces venant de l’intérieur comme celles venant de l’extérieur qui visent leurs droits et la sécurité de leurs territoires.
Comme nous l’avons toujours affirmé, nous serons toujours à leurs côtés dans leur combat pour que l’Amazighité reprenne la place qui est la sienne sur sa Terre et que notre Histoire plusieurs fois millénaire soit libérée de ces idéologies qui tentent de l’enterrer.
Tudert i Tmaziɣt
Tamazgha,
Paris, le 28 février 2025