Interview avec Fadila laanan: Ministre-présidente du gouvernement francophone bruxellois

laananIl y a plus de 100 jours que l’exécutif bruxellois est en place. Et dans le gouvernement Vervoort II, Madame Fadila Laanan : Secrétaire d’Etat à la Région de Bruxelles-Capitale, chargée de la Propreté publique et de la Collecte et du Traitement des Déchets, de la Recherche scientifique, des Infrastructures sportives communales et de la Fonction publique.

En outre, Madame Fadila Laanan est Ministre-Présidente du Gouvernement francophone bruxellois, chargée du Budget, de l’Enseignement, du Transport scolaire, de l’Accueil de l’Enfance, du Sport et de la Culture.

Le Journal le Monde Amazigh, édité au Maroc a voulu prendre la température, dans un entretien à bâtons rompus, des perspectives politiques régionales et culturelles avec Madame Fadila Laanan.

Madame Laanan, Bonjour vous venez de quitter le Ministère de la Culture et de l’Audiovisuel à la Fédération Wallonie-Bruxelles, quel bilan tirez-vous de votre action ministérielle à la Culture et à l’Audiovisuel?

J’ai quitté la fonction de Ministre de la Culture, de l’Audiovisuel, de la Santé et de l’Egalité des chances en juillet dernier. J’ai occupé la fonction de Ministre de la Culture et de l’Audiovisuel pendant deux législatures, c’est à dire 10 ans. Au cours de cette longue période, j’ai pu mettre en place des politiques structurelles dans différents domaines s. Principalement dans le cadre de la diversité culturelle. De plus, avoir plusieurs compétences m’a permis de travailler de manière transversale en intégrant cette notion de diversité dans la Culture au sens large mais également en Audiovisuel et en Santé. Au cours des dernières années, nous avons vu émerger des opérateurs culturels porteurs cette diversité, tel que l’Espace Magh. Et nous avons aussi observé le développement d’artistes belges d’origine étrangère s’épanouir dans leurs arts. L’année dernière, nous avons fêté les 50 ans de l’immigration marocaine et turque et cela a été en quelque sorte l’apogée culturelle de cette dynamique.

En 2008, sous votre autorité, vous avez organisé légalement avec le CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel) l’attribution des fréquences hertziennes aux différentes radios dans l’espace francophone. Pensez-vous que tout est en ordre dans ce domaine en attendant l’an 2019?

Le plan FM de 2008 et l’architecture en réseaux qui a été imaginée à ce moment-là ont permis de rationaliser la paysage FM de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Un équilibre a été trouvé entre les grands groupes privés, l’éditeur public (La RTBF), les radios provinciales et enfin l’ensemble des radios indépendantes. Le paysage FM a été stabilisé et de nombreuses radios, alors illégales, ont été régularisées. La situation qui prévalait jusque-là était chaotique, les éditeurs de radios évoluaient dans un vide juridique absolu.

Dire que tout est en ordre est un peu présomptueux, le secteur est en perpétuel développement et rien n’est figé. Une commission des optimisations a d’ailleurs été mise en place au sein du CSA, elle réunit, outre l’autorité régulatrice et les ingénieurs de l’administration, l’ensemble des opérateurs radio désirant améliorer leur couverture radio, que ce soit par optimisation, par l’utilisation de fréquences de réémissions, ou par décrochage. Généralement des consensus peuvent être trouvés. Maintenant, l’ensemble des opérateurs ne peuvent être satisfaits, notre réseau de fréquences est particulièrement dense et les marges de manœuvres sont limitées, il y a des déçus c’est inévitable, mais nous avons atteint le meilleur compromis en 2008.

J’attends beaucoup, d’ici 2019, des évolutions qui pourraient être faites en terme de radio numérique terrestre. Cela permettrait à long terme de dégager toute une série de fréquences sur la bande FM et accueillir de nouveaux projets. L’avenir offre encore de nombreuses perspectives pour la radio.

Quels sont les grands axes de la politique que vous voulez mener en RBC (Région de Bruxelles Capitale)?

Je suis secrétaire d’État à la Région et je suis chargée de la Propreté publique et de la Collecte et du Traitement des Déchets, de la Recherche scientifique, des Infrastructures sportives communales et de la Fonction publique. Je suis ravie d’avoir la compétence qui concerne la Propreté car cela permet d’avoir un impact concret sur la vie des citoyens et d’améliorer autant que possible leur quotidien.

D’ailleurs, dans ce secteur, nous allons amorcer une réforme sur toute la Région de Bruxelles Capitale afin de simplifier la question liée à la collecte des déchets et l’utilisation efficace des agents de Bruxelles Propreté afin que Bruxelles soit une ville encore plus propre. Vue le statut de Bruxelles comme capitale Européenne et abritant un grand nombre d’institutions internationales, la propreté est un des objectifs majeurs.

Par ailleurs, je suis également Ministre-présidente du Gouvernement francophone bruxellois. Ce poste me donne la possibilité de représenter et de veiller aux intérêts de tous les francophones vivant sur le territoire bruxellois. J’ai également les compétences liées à la Culture à Bruxelles, l’Enseignement, l’accueil de la petite enfance et le Budget. Cela me donne également les moyens de mettre en place des politiques proches du citoyen.

La RBC est une mosaïque des cultures et des communautés nationales diverses. Comment, selon vous, réussir un maillage culturel et une cohabitation intercommunautaire dans cette 3ème région belge?

Effectivement, la Région de Bruxelles-Capitale est une région multiculturelle. Environ 46 % des Bruxellois sont d’origine étrangère. C’est ce qui fait de cette Région sa richesse mais également ses défis. Bruxelles est une capitale qui accueille un grand nombre d’institutions internationales, ce qui lui donne une vitrine sur le monde. Et son attrait s’est développé ces dernières décennies. Bruxelles abrite également un grand nombre de personnes qui viennent s’y installer chaque année. Quoi qu’en dise certains, cette immigration représente une plus-value.

Comme vous le savez, la Belgique est également un état fédéral doté de 3 communautés. La Région de Bruxelles-Capitale est un exemple du fameux compromis « à la belge ». La communauté néerlandophone et la communauté francophone y sont représentées par des institutions qui veillent aux intérêts de chacun des citoyens.

Lorsque j’exerçais la fonction de Ministre de la Culture, j’ai signé avec ma collègue de l’époque Joke Schauvliege, un accord de coopération historique entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Flandre en matière de Culture.

Les synergies sont essentielles. Je suis contre les phénomènes de repli sur soi. Toutes les communautés ont un intérêt à se parler et à échanger.

Bruxelles, c’est aussi une fenêtre vers le Maroc. Justement par rapport aux avancées politiques et culturelles là-bas. Pensez-vous que la culture Amazigh a sa réelle place aujourd’hui?

En ce qui concerne les politiques culturelles au Maroc, je ne peux pas me prononcer. Mais je sais que des réformes ont été faites dans le sens de la reconnaissance de la culture Amazigh. La nouvelle constitution a érigé l’Amazigh comme langue nationale après l’arabe, c’est un pas en avant. Nous voyons également que l’Amazigh a fait une entrée visible dans la société marocaine, on voit de plus en plus des écriteaux dans les langues Amazigh. De plus, les parlementaires peuvent s’exprimer en Amazigh au parlement et elle est enseignée dans certaines régions. Il y a eu du changement et je pense que le mouvement berbère a fait un travail d’information pour sensibiliser les autorités à leur cause et leur identité.

Une culture, c’est une animation. Avez-vous l’impression que la culture berbère (Amazigh) en Belgique ne s’exprime mutuellement à la hauteur des talents, en termes de créativités?

Le mouvement est présent en Belgique. Lorsque j’étais Ministre de la Culture, j’ai soutenu quelques projets typiquement berbères. Il y a peut-être un manque de visibilité mais c’est plus lié à une faible demande qu’à un manque de soutien. Je pense également que le mouvement Amazigh en Belgique est automatiquement assimilé dans la culture marocaine en générale. Dès lors, il fait partie d’un tout.

Le mot de la fin, Madame la Ministre?

Vive la diversité !

Interview réalisé par: Mohamed El Hamouti

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